Qu’est-ce qu’un drapeau de prière tibétain ?

On les retrouve sur quasiment toutes les photos des montagnes de l’Himalaya. Ce sont ces petits bouts de tissus aux couleurs vives qui s’agitent au gré des coups de vent, ceux qui font que les voyageurs peuvent confirmer qu’ils sont bien en Inde, au Népal ou au Bhoutan, et non pas en Savoie ou dans les Pyrénées.

Mais les drapeaux de prière tibétains, parfois appelés drapeaux à prières par ceux qui prennent des libertés avec la langue française, sont bien entendu bien plus qu’un simple élément décoratif, ou un souvenir pour touriste.

Leur histoire est ancienne, leur signification est profonde, et leur importance est immense pour les Bouddhistes de ces régions. Depuis qu’ils ont été découverts par les Occidentaux, les drapeaux de prière tibétains se sont répandus dans le monde entier, et les informations à leur sujet sont devenues imprécises.

Si vous êtes passionné par le bouddhisme, que vous souhaitez comprendre la signification de ces drapeaux aperçus lors de vos dernières vacances dans l’Himalaya, ou que vous avez tout simplement soif de connaissance… Voici quelques informations sur le drapeau de prière tibétain.

Le drapeau de prière tibétain en quelques mots

Ce sont le plus souvent de petits carrés de tissu colorés (bleu, blanc, rouge, vert et jaune-orange), cousus sur une guirlande, sur lesquels sont imprimés différents mantras, prières, symboles, ou textes religieux. 

Accrochés en hauteur, sur un sommet ou dans un col montagneux, mais aussi sur le toit d’un bâtiment ou la pile d’un pont, ils dansent avec le vent. Selon la croyance bouddhiste, l’air qui souffle emporte les messages sacrés imprimés sur les drapeaux, pour les transmettre aussi bien vers les divinités que les voyageurs de la région.

C’est la réponse que l’on reçoit le plus souvent lorsque l’on pose une question au sujet des drapeaux de prière tibétains, et elle est effectivement correcte. Mais il y a tellement plus à dire…

L’utilisation du drapeau de prière tibétain

Non, il ne suffit pas d’accrocher un drapeau à prière sur son balcon pour respecter la tradition… Ils ne s’accrochent pas n’importe quand ni n’importe où, et n’ont pas tous la même signification.

Pour que son message porte le plus loin possible, un drapeau de prière tibétain doit être mis en place le matin, lors d’une journée ensoleillée durant laquelle le vent souffle de manière raisonnable. Certaines dates sont plus favorables, tandis que d’autres sont à proscrire, au risque d’obtenir des résultats totalement contraires à ceux souhaités.

Par ailleurs, il est évident qu’un drapeau de prière tibétain doit être placé là où son message portera le mieux. Sur le mur du salon, il y a peu de chance que les caresses du vent puissent transmettre les prières, tandis qu’un drapeau de prière remerciant les dieux pour les bonnes conditions en montagne n’a pas vraiment sa place sur le balcon d’un appartement en ville.

Enfin, il est important de savoir que les drapeaux de prière tibétains ne sont pas faits pour rester indéfiniment. Ils s’usent et se dégradent sous l’effet du vent qui emporte ses symboles, et leur durée de vie est limitée dans le temps. Au Tibet, ils sont remplacés chaque année lors du Losar, une festivité correspondant au Nouvel An Tibétain.

Les différents types de drapeaux de prière tibétains

Il existe deux types de drapeaux de prière tibétains :

  • Le Loungta, ou « cheval du vent ». C’est la fameuse guirlande multicolore, et c’est à eux que la plupart des gens font référence lorsqu’ils parlent de drapeau de prière tibétain. Tous les carrés de tissu ont un cheval représenté (d’où le nom) portant les trois joyaux du bouddhisme (Bouddha, Dharma et Sangha).
  • Le Darchok, beaucoup moins connu, mais pourtant très utilisé. Il s’agit d’une longue étoffe pouvant être de couleur variée, qui flotte sur un mât de plus de trois mètres de haut. Sur le tissu, différentes prières et textes sacrés sont imprimés.

Il est à noter que l’ordre des couleurs sur Loungta n’est pas indifférent, mais suit au contraire une logique liée au message que l’on souhaite transmettre. Deux carrés de la même couleur ne se suivent jamais.

Le darchok

L’histoire du drapeau de prière tibétain

Il est aujourd’hui admis que les drapeaux de prière tibétains trouvent leur origine dans la religion Bön, qui précède l’arrivée du bouddhisme dans l’ancien Tibet. Les moines Bonpos utilisaient déjà ces drapeaux pour que leurs prières soient transmises aux divinités, et seuls les textes et symboles ont ensuite été changés pour les adapter aux enseignements de Bouddha.

Jusqu’au 15ème siècle, les illustrations et les textes étaient réalisés à la main, mais l’arrivée depuis la Chine du principe de l’imprimerie allait tout révolutionner. De superbes tampons en bois furent alors créés, et permirent de transmettre les messages originaux de génération en génération.

Lors de l’occupation par l’armée chinoise, nombre de ces tampons furent détruits (la légende dit qu’ils servirent de bois de chauffage), mais aujourd’hui les artisans tibétains utilisent toujours des tampons en bois pour la confection des véritables drapeaux de prière tibétains.

La signification des drapeaux de prière tibétains

Chaque couleur a une signification bien précise :

  • Le bleu représente soit le ciel et la voute céleste (école Nyingma) soit l’eau (autres écoles). C’est aussi la couleur du Bouddha Akshobya.
  • Le blanc représente le vent, l’air. C’est aussi la couleur du Bouddha Amitabha.
  • Le rouge représente le feu. C’est aussi la couleur du Bouddha Vairocana.
  • Le vert représente l’eau (école Nyingma) ou le ciel et l’espace (autres écoles). C’est aussi la couleur du Bouddha Amoghasiddhi.
  • Le jaune-orange représente la terre. C’est aussi la couleur du Bouddha Ratnasambhava.

Par ailleurs, de nombreux symboles apparaissent sur ces drapeaux de prière, notamment les 8 Astamangala :

  • La bannière, signe de la victoire.
  • Les deux poissons, signe de fertilité.
  • Le vase, signe d’abondance et de richesse intellectuelle.
  • Le lotus, signe de purification du corps.
  • La conque, signe d’absence du « Mal ».
  • Le nœud infini, signe de sagesse et de compassion.
  • L’ombrelle, signe de protection.
  • La roue, signe de propagation du savoir.

La fabrication du drapeau de prière tibétain

Malgré les affirmations des offices de tourisme local, ainsi que celle de nombreux vendeurs de souvenirs, la grande majorité des drapeaux de prière tibétains que l’on trouve aujourd’hui sont produits de manière industrielle, dans des usines.

Traditionnellement, le véritable drapeau à prière tibétain est fait entièrement à la main.

Les tablettes en bois servant de tampon imprimeur sont sculptées par des artisans. Les carrés de coton tissés sont ensuite marqués de manière individuelle, puis cousus manuellement sur la corde. 

Comment reconnaître un véritable drapeau de prière tibétain ?

Il n’y a pas de véritable solution infaillible, et certaines imitations faites en usine réussissent à s’approcher de ceux fabriqués à la main. Il y a cependant quelques signes qui peuvent vous aider à faire la différence :

  • Les drapeaux doivent être en coton tissé, pas en fibre synthétique
  • Seul le bord vers la cordelette est cousu, les autres s’effilochant (ce qui permet aux prières de mieux être portées par le vent)
  • Les textes et symboles sont imprimés grâce à un tampon encreur, qui peut baver et laisser quelques traces.

Les problèmes environnementaux liés au drapeau de prière tibétain

Il est impossible de ne pas en parler, afin que le monde soit réellement conscient de ce qu’un geste anodin et respectueux peut avoir comme conséquence.

La mode du drapeau de prière tibétain qui a conquis le monde occidental fait qu’aujourd’hui on le retrouve un peu partout, en grandes quantités. Toutes les expéditions himalayennes en accrochent, que ce soit le guide local qui souhaite remercier les dieux de ne pas avoir causé d’accident, ou les touristes qui veulent « respecter la coutume ».

C’est ainsi que certains cols et sommets célèbres sont devenus de véritables « cimetières à drapeaux », et pas seulement dans les montagnes de l’Himalaya…

Les drapeaux de prières traditionnels sont biodégradables et s’usent vite… Mais de nombreux touristes, qui souhaitent certainement atteindre la postérité éternelle, préfèrent avoir recours aux drapeaux industriels synthétiques, dont la durée de vie est de plusieurs dizaines d’années, pour « ne pas avoir à remonter l’année prochaine ».

Les drapeaux de prières laissés par les adeptes du bouddhisme sur les sommets himalayens ont une signification profonde ; et c’est une tradition millénaire. Accrocher des bouts de plastique dans les Alpes est une habitude récente, proche de celle qui consistait il y a encore quelques années à laisser des boites de conserve et des sacs en plastique pour montrer aux suivants que l’on était passé ici avant…

Conclusion

Le drapeau de prière tibétain est un objet mystique absolument fascinant, tant par son histoire et son symbolisme, que par tout ce qu’il évoque : les grands espaces des montagnes de l’Himalaya, les enseignements du Bouddhisme, une culture différente… C’est sans surprise qu’ils ont suscité l’intérêt du monde entier !

L’engouement pour les drapeaux traditionnels a été une véritable bouffée d’air frais pour les artisans tibétains, principalement basés au Népal, dont le niveau de vie s’est considérablement amélioré depuis qu’ils peuvent vendre leurs produits aux touristes. Ces drapeaux en coton entièrement biodégradable n’ont qu’un impact réduit sur l’environnement, même si certains puristes les considèrent comme une pollution visuelle.

En revanche, les drapeaux de prière tibétains industriels synthétiques ont tout pour devenir un véritable désastre écologique s’ils continuent à être abandonnés un peu partout dans les montagnes, le plus souvent par des personnes mal informées n’ayant absolument pas conscience de l’impact de leur geste.

Le seul moyen d’empêcher que le drapeau de prière tibétain garde son aspect mystique et ne se transforme en un produit de consommation : acheter de véritables drapeaux traditionnels, et éviter les imitations fabriquées à la chaîne !

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